Qui n'a jamais vu un candidat battu aux élections, ou sur le point de l'être, ne peut pas vraiment comprendre la vie politique. Depuis dimanche, c'est Dominique Perben qui n'apparaît plus à Lyon, éliminé au premier tour, humilié, sans doute brisé et pas seulement dans ses ambitions. C'est Fabienne Keller à Strasbourg qui, à deux reprises au moins, en public, ne retient pas ses larmes. C'est à Paris Françoise de Panafieu qui tente de faire bonne figure, parle de ce qu'elle fera si elle est élue avec une telle tristesse dans la voix qu'on s'en veut presque d'être venu lui poser des questions sur ce qui se passera lundi, au lendemain de sa probable défaite.
Plus loin en arrière, c'est Jacques Chirac en mai 1988, un soir de défaite présidentielle, le visage ravagé face à Line Renaud qui pleure. C'est Lionel Jospin qui, le 21 avril 2002, dit qu'il abandonne la politique sans laisser transparaître aucun sentiment. C'est Valéry Giscard d'Estaing qui, aujourd'hui encore, 27 ans après, a les yeux embués quand il se revoit en 1981, disant aux Français un "au-revoir" un peu ridicule et tellement pathétique. C'est aussi le maire d'une toute petite commune de France que les électeurs renvoient dans ses foyers, éconduit comme on quitte un amoureux. C'est cela, la défaite en politique: très exactement ce qui se passe quand quelqu'un qu'on aime, soudain, lance à travers les urnes un "je ne t'aime plus" collectif. C'est dur comme une rupture, violent comme un chagrin d'amour.
B.H
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